Les États-Unis, sous l’administration du président Donald Trump, ont décidé d’imposer des droits de douane additionnels sur plusieurs produits depuis le 12 mars, notamment sur l’acier et l’aluminium. En réponse, le Canada a riposté en appliquant des droits de douane sur certains produits alimentaires et autres biens manufacturés en provenance des États-Unis. Cependant, cette première série de mesures n’était que le début d’un conflit commercial plus large. Les États-Unis ont l’intention d’élargir cette politique à toutes les marchandises, et le Canada se prépare à ajouter d’autres produits à sa liste de représailles.
Les droits de douane sont l’un des principaux instruments du protectionnisme. Leur objectif principal est de rendre les produits étrangers plus coûteux afin de favoriser la consommation de produits comparables fabriqués localement. En plus de protéger l’industrie nationale, ces droits constituent une source de revenus importante pour les gouvernements qui les appliquent.
Dans un contexte de libre-échange, les droits de douane sont souvent réduits ou éliminés pour encourager les échanges internationaux. Le Canada participe à plusieurs accords de libre-échange, dont l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM), afin d’éliminer, entre autres, les barrières tarifaires et de permettre aux manufacturiers canadiens d’être plus compétitifs à l’international. Bien que ces accords facilitent l’exportation vers d’autres pays, ils permettent également aux produits étrangers d’entrer au Canada sans être taxés, ce qui peut parfois nuire aux industries locales. Toutefois, les avantages d’un accès à un plus grand marché mondial compensent souvent les désavantages à court terme.
L’importation au Canada fonctionne selon un processus bien défini. Une entreprise canadienne (l’importateur) achète de la marchandise à l’étranger et négocie un prix incluant ou non le transport et l’assurance, selon les obligations de l’acheteur et du vendeur régis par les « incoterms ». Une fois la marchandise expédiée au Canada, elle est dédouanée par un courtier en douane. L'importateur est majoritairement une entreprise canadienne. Si des droits de douane s’appliquent, ainsi que la taxe sur les produits et services (TPS), ces montants sont versés au gouvernement canadien par le programme de la GCRA (Gestion des cotisations et des recettes de l'ASFC). Cette approche garantit que l’importateur canadien est le principal responsable du paiement des taxes et des droits liés à la marchandise.
Le processus d’importation aux États-Unis est sensiblement différent. Lorsqu’une entreprise canadienne vend de la marchandise à un client américain, une négociation a lieu pour déterminer si le prix inclut le transport et l’assurance. Cependant, la principale différence réside dans le processus de dédouanement. Contrairement au Canada, où l’acheteur est généralement responsable du dédouanement, les entreprises américaines préfèrent souvent ne pas s’occuper de cette tâche. Ainsi, c’est l’exportateur canadien qui devient « importer of record » pour la douane américaine (U.S. Customs and Border Protection - CBP).
Dans le cas des produits alimentaires, l’exportateur canadien doit également s’enregistrer auprès de la U.S. Food and Drug Administration (FDA) et envoyer un avis d’importation (prior notice) avant l’arrivée de la marchandise. De plus, il doit engager un courtier en douane américain pour gérer le dédouanement en son nom. Ce processus signifie que, dans plus de 95 % des cas, c’est le vendeur canadien qui paie les droits de douane au CBP, et non l’acheteur américain.
De nombreuses entreprises canadiennes ont récemment pris conscience de leur responsabilité dans le paiement des droits de douane. Jusqu’à présent, elles recevaient une facture modeste de leur courtier en douane américain, comprenant uniquement des frais de service, généralement inférieurs à 100 $. Cette situation était possible grâce aux accords de libre-échange en vigueur depuis 1989, qui permettaient l’importation sans droits de douane. Toutefois, avec l’arrivée des tarifs de 25 % sur l’acier et l’aluminium canadiens imposés par le gouvernement américain, ainsi que sur d’autres produits à partir d’avril, la réalité a changé.
Les entreprises canadiennes qui exportent aux États-Unis doivent désormais s’adapter à cette nouvelle donne. Plusieurs stratégies émergent : certaines ajoutent directement le coût des nouveaux tarifs à la facture de leur acheteur américain, d’autres négocient un partage des frais, tandis que certaines absorbent totalement cette hausse dans leurs prix.
L’augmentation des droits de douane entraîne des conséquences financières importantes. Selon mon agent américain, ces nouveaux droits de douane représentent environ 14 milliards de dollars américains à collecter auprès de leurs clients exportateurs canadiens. Cette somme colossale génère un volume de travail considérable pour les courtiers en douane américains, qui ne sont pas des institutions financières et qui doivent néanmoins assurer la collecte de ces montants auprès des entreprises canadiennes.
Des mécanismes existent pour alléger cette charge administrative, notamment le paiement direct au gouvernement américain via le système Automated Clearing House (ACH). Cependant, un autre défi se profile : l’augmentation des cautionnements douaniers. Actuellement fixés à un minimum de 50 000 $, ces cautionnements devront éventuellement couvrir 100 % des droits payés en un mois, ce qui risque d’alourdir encore plus les contraintes financières des exportateurs canadiens.
En réponse aux tarifs américains, le Canada a mis en place des droits de douane sur divers produits en provenance des États-Unis, notamment des produits alimentaires et des biens manufacturés. Ces mesures visent à exercer une pression économique sur les États-Unis et à encourager une révision des politiques protectionnistes mises en place sous l’administration Trump.
Toutefois, ces représailles ne sont pas sans conséquence pour les consommateurs canadiens. L’augmentation du coût des produits importés entraîne une hausse des prix à la consommation, affectant divers secteurs de l’économie. De plus, certaines industries canadiennes, fortement dépendantes des matières premières américaines, doivent également absorber ces nouveaux coûts ou les répercuter sur leurs clients.
Si ces mesures tarifaires se poursuivent, les entreprises canadiennes devront repenser leurs stratégies commerciales pour minimiser l’impact des droits de douane. Cela pourrait inclure une diversification des marchés d’exportation, une relocalisation de la production ou une renégociation des accords avec les partenaires commerciaux américains.
En revanche, une levée de ces barrières tarifaires dépendra largement de négociations diplomatiques et d’accords bilatéraux entre les deux pays. L’ACEUM a permis d’atténuer certaines tensions, mais les différends commerciaux demeurent une réalité dans un contexte économique mondial en perpétuelle évolution.
Les droits de douane additionnels imposés par les États-Unis et les mesures de représailles canadiennes ont bouleversé les échanges commerciaux entre les deux pays. L’impact est particulièrement ressenti par les entreprises canadiennes, qui doivent désormais assumer des coûts plus élevés et revoir leurs stratégies de vente aux États-Unis.
Bien que ces politiques protectionnistes visent à renforcer les économies nationales, elles génèrent également des défis pour les entreprises et les consommateurs. La question reste de savoir si ces mesures seront temporaires ou si elles marqueront un tournant dans les relations commerciales entre le Canada et les États-Unis. Quoi qu’il en soit, les entreprises devront s’adapter pour survivre dans cet environnement en mutation constante.