Le Pôle de recherche et d’innovation en matériaux avancés (PRIMA Québec) a publié en 2022 un livre blanc décrivant l’état de la situation de la fabrication additive au Québec. « Cet état des lieux a permis d’évaluer la situation de la fabrication additive au Québec par rapport à certains pays. Il était donc important d’encourager les entreprises à adopter les nouvelles technologies et de soutenir l’écosystème de la fabrication additive », explique Fanny Charreteur, coordonnatrice du Carrefour québécois de la fabrication additive (CQFA). Ce dernier regroupement émane d’une idée proposée par le Livre blanc sur la fabrication additive au Québec, publié en 2020, soit : d’avoir un guichet unique répondant parfaitement au besoin d’agilité dont fait preuve l’entrepreneur.
Dans son Livre blanc sur la Fabrication additive au Québec publié en mars 2020, PRIMA définit la fabrication additive, également appelée impression 3D, comme une méthode de conception et de fabrication assistée par ordinateur portant sur la mise en forme d’une pièce fonctionnelle par apport successif de matière et d’énergie, contrairement à la fabrication traditionnelle soustractive, qui agit par enlèvement de matière (découpage ou fraisage). Les familles de technologies mises de l’avant par la fabrication additive comprennent la photopolymérisation, l’extrusion, la pulvérisation de matière, la fusion de poudre, la déposition directe par énergie ou de laminage en feuille. Du côté des matériaux utilisés pour la fabrication additive, ils sont de plus en plus nombreux : polymères, métaux (chrome, nickel, aluminium, cobalt, titane, scandium), céramique, matériaux composites et même de la matière organique (bois, cire, matières alimentaires, tissus biologiques).
L’écosystème québécois comprend plusieurs joueurs dont de nombreuses entreprises manufacturières et de services ainsi que des centres collégiaux de transfert technologique (CCTT) et autres établissements de recherche et d’innovation parmi lesquels on retrouve :
• COALIA, un CCTT en technologie minérale et plasturgie au Cégep de Thetford;
• Le CMQ (centre de métallurgie du Québec) au Cégep de Trois-Rivières;
• Le CDCQ (Centre de développement de composites du Québec) du Cégep de Saint-Jérôme;
• Laboratoire de mécanique multiéchelles LM2 de l’école polytechnique;
• Le RI3D-FRQNT (Regroupement innovant durable – Fonds de recherche du Québec – Nature et Technologie) œuvrant dans le secteur de la construction;
• L’INÉDI, le CCTT en recherche et design industriel du Cégep de Lanaudière;
• L’Institut pour les matériaux avancés de l’université McGill;
• Laboratoire de biomatériaux pour l’imagerie médicale de l’université Laval.
« De plus en plus d’entreprises découvrent les avantages de la fabrication additive alors que les progrès technologies enregistrés au cours des 20 dernières années sont incroyables. Selon les besoins, le coût des équipements requis est de plus en plus à la portée d’entreprises de toutes les tailles », ajoute madame Charreteur.
« L’aéronautique est sans contredit le secteur industriel utilisant le plus la fabrication assistée alors que les industries de la santé et de la construction commencent à l’adopter en plus grands nombres. » La fabrication additive réussit également à tirer son épingle du jeu dans la réparation, l’énergie, l’outillage industriel, le matériel de transport et encore plus.
À l’université Laval, le Laboratoire de biomatériaux pour l’imagerie médicale comprend un laboratoire d’impression 3D avec des appareils à la fine pointe technologique. Des appareils sont opérés par des experts qui se concentrent sur l’élaboration de dispositifs médicaux en développant de nouveaux matériaux. Le laboratoire de mécanique multiéchelles LM2 de l’école polytechnique de l’Université de Montréal développe des matériaux et des concepts de fabrication additive pour les composites polymères et les matériaux multifonctionnels pour les secteurs de l’aérospatial, des transports et de l’énergie. Le LM2 conçoit aussi des structures intelligentes intégrées dans de nouvelles fonctionnalités de détection et d’actionnement grâce à la fabrication additive. L’ajout de matériaux intelligents aux composants structuraux permet de créer des structures intelligentes légères.
« Actuellement, les États-Unis et l’Allemagne sont les principaux concepteurs des équipements requis pour la fabrication additive alors que la Chine ne fait que faire son entrée sur ce plateau. À cause de la disponibilité de plusieurs matières chez nous, le Québec est reconnu comme un producteur de poudres », constate Fanny Charreteur.
Parmi les producteurs de poudres, on retrouve des joueurs de premier ordre comme AP&C Revêtements et poudres avancées ainsi que Tekna. « D’autres joueurs se joignent régulièrement à l’écosystème québécois qui compte plus de 300 intervenants. L’industrie de la défense du Canada se montre intéressée à créer ses propres pièces dans un proche avenir. Le CQFA travaille à promouvoir la chaîne des valeurs postproduction et la qualité des pièces émanant de la fabrication additive. »
La Feuille de route 2035 de la fabrication additive brosse un portrait de l’écosystème québécois en indiquant que 570 entreprises y sont actives, dont un grand nombre dans la production et l’intégration de matériaux avancés ainsi que le développement d’équipements et de procédés associés. En 2024, le chiffre d’affaires du secteur atteignait 15 milliards de dollars et son nombre d’emplois était de 49 000, dont 65% sont en phase de croissance. De plus, 70% des revenus des entreprises proviennent de l’exportation. La R-D est une activité importante dans 99% des entreprises et 7% de tous les emplois sont consacrés à ce chapitre.
Selon Alexandre Bois-Brochu, ing. PhD, responsable d’axe R&D – fabrication additive et poudres métalliques, de la fabrication additive et de la mise en forme des métaux au Centre de la métallurgie du Québec du Cégep de Trois-Rivières, les nouvelles technologies arrivent sans cesse dans le secteur. « Il existe maintenant des machines pour les polymères et d’autres pour les poudres métalliques, certaines avec des lasers de 100 à 200 watts qui sont aujourd’hui beaucoup plus puissants qu’il y a 8 ou 10 ans. Les fournisseurs offrent des solutions puissantes proposant des technologies comme le LPBF (Laser Power Bed Fusion) pour les métaux. Malgré les avancements des matériaux disponibles, il arrive encore qu’il soit nécessaire de prévoir une quarantaine d’heures pour produire certaines pièces volumineuses et/ou complexes », dit-il.
Lorsque la taille des pièces le permet, des manufacturiers entasseront plusieurs petites pièces afin d’en fabriquer un plus grand nombre dans une même commande. « Les Chinois ont commencé à travailler avec des machines permettant de fabriquer des pièces de 1.5 m x 1.5 m. Quelle que soit la grandeur des pièces à fabriquer, il faut toujours respecter les normes des matériaux utilisés, comme la Ti6AL4V pour les alliages de titane de grade 5 à 23. Certaines machines sont conçues pour utiliser divers matériaux, mais elles doivent être complètement nettoyées après une commande afin qu’il n’y ait pas de mélange. D’autres machines sont construites pour utiliser un seul alliage en continu », affirme monsieur Bois-Brochu.
Accélérateur technologique de l’Alliance polymère Québec, le Centre d’innovation en plasturgie et matériaux avancés (Le Moule) promeut le développement et la commercialisation de produits innovants en matériaux plastiques et composites. Le Moule accompagne les entreprises et les inventeurs à plusieurs niveaux dans la réalisation de leurs projets. Les équipes du CMQ travaillent sur des alliages et développent des paramètres d’impression par clé DED (Dépôt d’énergie directe – Directed Energy Deposition). Le CMQ élabore des poudres en déterminant leurs caractéristiques et les propriétés des alliages. Ce faisant, il accompagne souvent des clients dans le développement de leurs produits en proposant divers matériaux avancés novateurs. C’est avec ce type de collaboration offert par Le Moule et le CMQ que les matériaux avancés propulsent la fabrication additive au Québec.